Le 21 septembre, la présidente de la Cnil, saisie d'un recours gracieux visant au retrait de sa mise en demeure contre Google (notre actualité du 15 juin) a décidé de rejeter celui-ci.
Si vous avez raté le début du feuilleton…
Après avoir été mis en demeure de déréférencer les résultats légitimement indésirables de son moteur de recherche sur toutes les plateformes de consultation de celui-ci dans le monde, en mai 2015, Google a tout d'abord sollicité un délai supplémentaire à la Cnil pour prendre le temps d'étudier les implications de la demande (notre actualité du 13 juillet).
Le 30 juillet un discret commentaire était publié sur le blog de Google, faisant savoir que la firme californienne n'avait pas l'intention d'obtempérer à la mise en demeure (notre actualité du 6 août).
Dans le même temps, Google formait un recours gracieux auprès de la présidente de la Cnil lui demandant de retirer cette mise en demeure. Le rejet de ce recours vient donc d'être officialisé, sans surprise.
Perspectives d'évolution du contentieux
Sur le plan purement national, la présidente de la Cnil a désormais la faculté de désigner un rapporteur pour l'affaire, qui pourra lui-même saisir la formation contentieuse de la Cnil en vue de prononcer des sanctions à l'encontre de Google.
La Cnil dispose en effet de pouvoirs de sanctions non négligeables dont Google déjà fait les frais, au sens propre comme au figuré. C'est sur cette base que le géant américain s'est vu frappé de la "sanction pécuniaire" légale maximum de 150 000 € le 8 janvier 2014, la Cnil estimant que les règles de confidentialité mises en œuvre par Google depuis le 1er mars 2012 n'étaient pas conformes à la loi. S'ajoutait l'injonction de procéder à la publication d’un communiqué relatif à cette décision sur la page d’accueil de Google.fr, sous huit jours à compter de la notification de la décision, et bien sûr l'obligation de se mettre en conformité avec la loi (notre actualité du 16 janvier 2014).
La Cnil dispose d'autres moyens de sanctions. Elle peut aussi choisir de saisir le procureur de la République d'une plainte au pénal pour entrave à la loi Informatique, fichiers et libertés. Les sanctions prévues dans ce cas peuvent aller jusqu'à 300 000 € d'amende, montant qui peut être multiplié par cinq pour les personnes morales (sociétés), sans parler des peines privatives de liberté. S'il est difficile de mettre une société en prison, le Code pénal permet toutefois des possibilités d'interdiction d'exercer ou de fermeture, définitive ou temporaire de la société en question. C'est dans ce cas Google France qui pourrait être visée.
Par ailleurs, il est probable que d'autres autorités de protection des données au sein des autres États membres de l'UE ont aussi reçu des demandes similaires à celles traitées par la Cnil, à savoir des ressortissants demandant expressément le déréférencement de liens indésirables, y compris sur google.com et sur d'autres plateformes dans le monde. Rien n'interdit de penser que Google soit aussi poursuivi par d'autres "Cnil" en Europe. Rappelons en effet que l'exigence de déréférencement sur toutes les interfaces de recherche de Google dans le monde est déjà contenue en filigranes dans l'arrêt de la CJUE du 13 mai 2014 (notre analyse du 17 juin 2014), confirmé par l'analyse commune des autorités de protection groupées au sein du G29 de novembre 2014, actuellement présidé par Mme Falque-Pierrotin, également présidente de la Cnil (notre actualité du 9 décembre 2014).
Dans la guerre qu'a visiblement choisi de livrer Google, l'Union européenne dispose donc de moyens d'action juridiques et judiciaires dont l'action de la Cnil pourrait n'être qu'un tout premier épisode.
Nous reviendrons ultérieurement sur les motivations juridiques du rejet du recours. Elles sont tout à fait intéressantes.
En savoir plus
Lire l'actualité publiée le 21 septembre sur le site de la Cnil :
www.cnil.fr/nc/linstitution/actualite/article/article/droit-au-dereferencement-rejet-du-recours-gracieux-forme-par-google-a-lencontre-de-la-mis/
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