Une évidence
La société de l'information sera inévitablement celle du droit de l'information.
Il semble qu'il soit difficile pour certains d'en prendre conscience, mais c'est pourtant tellement évident que cela devrait sauter aux yeux. La société de l'information est celle dans laquelle on ne consomme plus que des denrées intellectuelles, immatérielles, qui se résolvent en fait en des droits tout aussi immatériels. De sorte que près de 90% des échanges économiques sur la planète portent sur des biens immatériels, donc sur des droits intellectuels.
Si l'on se hasarde à faire l'analyse économique d'un bien matériel, en termes de répartition des coûts de revient, un stylo par exemple, on s'aperçoit très vite que la matière première entre pour environ 5% dans ce coût. Tout le reste n'est que propriété intellectuelle : la forme du stylo : dessin et modèle ; le logo : droit d'auteur et droit des marques ; le texte de présentation : droit d'auteur ; l'encre et la pointe : brevets, etc.
Il est donc absolument logique que la propriété intellectuelle, dans tous ses aspects, connaisse aujourd'hui un regain d'intérêt sans précédent : les droits de propriété intellectuelle sont logiquement amenés à se développer dans la proportion de l'information elle-même. De là l'exacerbation des positions des titulaires de droits et l'âpreté des conflits. Mais à ceci s'ajoute un autre facteur.
Une mondialisation pour une planète psychologiquement rétrécie
Aujourd'hui, la publication d'une ressource sur Internet est immédiatement consultable et donc consommable à l'échelon mondial. Là où les enjeux de propriété intellectuelle ne connaissaient naguère qu'une envergure locale, au pire nationale, ceux-ci prennent aujourd'hui une ampleur telle qu'il vaut la peine de ne pas se laisser déposséder. Ajouté à une meilleure information sur leurs droits, ce phénomène explique largement la recrudescence des contentieux sur ces questions dans tous les pays riches.
Ces deux facteurs font qu'aujourd'hui où tout se tient, où chacun dépend étroitement des voisins planétaires, il est absolument impossible d'ignorer la dimension juridique dans le secteur de l'information-documentation. C'était jadis illégal ou illicite ; à ces qualificatifs s'ajoute aujourd'hui celui de suicidaire ou d'irresponsable.
La mondialisation des connaissances juridiques
Autre conséquence de ces facteurs, il n'est plus suffisant aujourd'hui de connaître soigneusement le droit français, voire le droit communautaire. La propriété intellectuelle se planétarisant, il convient de suivre l'évolution, et des conventions internationales, et du droit des pays les plus importants. Cette préoccupation jadis réservée aux spécialistes du commerce et des échanges internationaux, apanage des spécialistes du droit international privé, atteint aujourd'hui une plus large couche d'entreprises : il est évident que le commerçant ou l'artisan qui ouvre sa boutique sur le net ne peut ignorer qu'il risque de vendre à tout client de la planète. Car avec Internet, le voisin est partout... Il faut donc maîtriser ces aspects transnationaux qui sans être insurmontables, s'ajoutent à la formation d'un juriste français normalement constitué et peu habitué à jongler avec plusieurs systèmes de droit.
Les premières formations à la propriété intellectuelle et/ou au droit d'auteur pour les chefs d'entreprises
Conséquence logique de notre constat, on voit apparaître aujourd'hui les premières formations d'initiation à la propriété intellectuelle, afin que nul n'en ignore. De confinée qu'elle était à quelques spécialistes, férus d'histoire de l'art, la matière s'étale aujourd'hui largement et s'ajoute au classique droit des affaires, et droit des sociétés, dans la panoplie des juristes d'entreprises, mais aussi dans les collectivités locales qui n'échappent pas, elles non plus, au phénomène.
|cc| Didier Frochot - novembre 2003
Voir aussi :
Les domaines de la propriété intellectuelle et le Schéma associé, ainsi que Aperçu du droit de l'information
Voir aussi dans la catégorie Management de l'information : De la société de l'information à l'industrie culturelle