Un réseau planétaire
Le premier des facteurs de succès - en termes chronologiques - et même la condition de base, est l'existence d'un réseau mondial. Ou plus exactement d'une interconnexion de réseaux nationaux, régionaux, sectoriels (par exemple en France, le Réseau national de l'enseignement et de la recherche - RENATER). Il est évident que sans ce réseau des réseaux, maillant l'ensemble de la planète, le reste ne pouvait suivre. A noter que psychologiquement, ce réseau, et les services qui vont y transiter de manière quasi instantanée pour tout un chacun, va rétrécir la planète. C'est bien entendu une illusion psychologique, mais elle est forte et l'expression de village planétaire souvent utilisée rend bien compte de cette mutation dans les mentalités.
Le multi-plateforme
Pour la première fois dans la courte mais riche histoire de l'informatique, des ordinateurs de types et de nature différentes vont pouvoir dialoguer... Nous imageons le propos, mais c'est bien une petite révolution qui s'est alors passée. Les échanges de données entre matériels fonctionnant sous des systèmes d'exploitation différents sont devenus possibles grâce aux efforts de normalisation. Cette évolution marche avec la généralisation de la messagerie qui suit.
Ainsi, histroiquement, les premiers servis furent les unixiens puisque l'Internet est né dans un environnement informatique fonctionnant sous Unix. Très vite, on va chercher à rendre les relations compatibles avec les deux autres mondes informatiques qui se sont taillés la part du lion : le monde PC et le monde Macintosh. Lorsqu'on envoie un e-mail à un correspondant, on ne se soucie pas (ou plus) de savoir si celui-ci est équipé d'un PC, d'un Mac ou d'une station Unix. On lui envoie le message, et, aujourd'hui, celui-ci est lu sans difficulté quel que soit l'environnement de départ et d'arrivée.
Il faut aussi mentionner ici, proche du multi-plateforme, la généralisation de l'interface graphique, née sur les premiers MacIntosh et copiée par Microsoft sous le nom de Windows - tellement bien copiée qu'un procès opposera Apple à Microsoft. C'est là un pas décisif pour donner à l'informatique, sinon un visage humain, mais au moins une apparence conviviale qui la rende accessible au plus grand nombre.
L'uniformisation de la messagerie
Les systèmes de messagerie électroniques étaient connus et utilisés, notamment dans les grandes entreprises depuis au moins 20 ans. L'ère Télétel en France a relayé cette réalité en diversifiant l'offre. Des tentatives des télécoms françaises pour généraliser une offre nationale n'ont pas abouti (1). Mais l'inconvénient restait celui de la diversité et de l'incompatibilité des systèmes. Ainsi, pour peu qu'on soit membre d'une grande entreprise, d'une association professionnelle, d'une association de parents d'élèves, d'une association de pêcheurs à la ligne et qu'on ait envie de posséder sa boîte aux lettres personnelle et privée, on devait disposer de pas moins de 5 boîtes aux lettres dotées de 5 numéros utilisateurs et de 5 codes confidentiels... Le grand pas en avant d'Internet fut de mettre tout le monde d'accord sur un standard de messagerie qui s'est imposé de facto. Il s'est si bien imposé que les grands systèmes de messageries internes d'entreprises d'aujourd'hui sont devenus compatibles avec les protocoles de messageries d'Internet (CC mail, Lotus Notes, Exchange...).
La naissance de la norme HTML
Enfin, par dessus toutes ces conquêtes et ces ouvertures, l'avènement de la norme HTML et l'éclosion du Web va sceller l'entier succès d'Internet. Celui-ci est impensable sans les commodités et la convivialité offerte par HTML. De l'hypertexte, on en arrive à l'hypermédia (combinaison de l'hypertexte et du multimédia). C'est là, sans conteste, l'avancée la plus significative. Il est amusant de constater que cet énorme coup de pouce au très américain Internet a été donné par un groupe de chercheurs largement européen, baigné par les eaux du lac Léman, dans la très neutre Confédération helvétique...
Voir sur ce point le paragraphe Naissance de la norme HTML et du WWW du texte Le succès de l'Internet grand public
|cc| Didier Frochot — décembre 2001
Note :
1. Le système de messagerie MISSIVE de la Direction générale des télécommunications (DGT) a connu son heure de gloire mais n'a jamais pu percer. C'était une tentative de standardisation d'une pratique déjà bien implantée dans les entreprises. Une conférence ADBS dans le cadre du SICOB des premières années 1980 avait mis en lumière l'intérêt d'une messagerie électronique, notamment pour la fourniture d'informations et de services documentaires, au sein d'une grande entreprise.
