Le fait divers a fait les gros titres de la presse cette semaine : une supérette parisienne a utilisé la manière forte pour tenter d'intimider les voleurs : les dirigeants ont pris l'initiative d'exposer des photos des présumés voleurs à l'entrée du magasin… Un intéressant exemple qui va d'une simple question de réputation dans le quartier de la supérette, au bad buzz, en passant par l'e-réputation (cyber-réputation, web-réputation, réputation numérique...) C'est pour nous l'occasion d'évoquer quelques facettes de l'e-réputation, notamment du bad buzz.
Des pratiques bien sûr illégales
Disons tout de suite que ce type de pratique est multiplement illégal.
Tout d'abord parce que chacun a droit à la présomption d'innocence tant qu'il n'a pas été définitivement condamné. C'est une règle inscrite textuellement dans la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du Conseil de l'Europe, signée en 1950 (article 6, 2), également consacrée par l'article 9-1 de notre code civil depuis 1971.
Ensuite parce que l'image d'une personne constitue une "donnée à caractère personnel" au sens de l'article 2 al.2 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, et le fait de la reproduire sur un support constitue un "traitement" de ces données qui ne peut être réalisé qu'avec l'accord des intéressés (ce qui recoupe le droit à l'image qu'on pourrait aussi invoquer) ou en vertu d'une nécessité légale (article 7 de la même loi). On n'était dans aucun de ces deux cas en l'espèce.
Dans cet affichage d'un autre âge, on pourrait trouver bien d'autres infractions à d'autres lois ou jurisprudences comme le droit à l'image, mais celles citées ici sont les plus flagrantes.
Une ignorance du droit doublée d'un manque de bon sens
Le plus étonnant, c'est que, même sans connaître tous les arcanes de nos lois — que pourtant nul n'est censé ignorer —, personne dans l'équipe dirigeante ne se soit posé la question de la simple décence et de la simple équité d'une telle action. C'est certes moins dévastateur que de publier les mêmes images sur Internet, au vu et au su de la planète entière, comme nous le voyons faire encore trop souvent dans nos missions de nettoyage. Mais malgré tout, la réputation des personnes est mise en cause. Qui sont ces dirigeants de magasin pour s'ériger ainsi en juges et décider qui est voleur, en dehors de toute investigation de police judiciaire ?
Une dérive vers la justice privée ?
En revient-on dans notre pays à la justice privée ?
C'est, nous semble-t-il, une tendance forte de l'évolution des mœurs informationnelles que nous constatons depuis quelques années dans le cadre de nos missions de nettoyage, notamment pour des clients lynchés verbalement en ligne.
Le tribunal populaire des avis de consommateurs
Pour preuve, les sites d'avis de consommateurs où tout un chacun peut, courageusement masqué sous un pseudonyme, avoir la peau d'un commerçant contre lequel il allègue des griefs, vrais, supposés ou inventés de toutes pièces pour lui nuire. De sorte que, des salles d'audience, les litiges se transportent vers des forums publics d'avis de consommateurs dans lesquels les gestionnaires s'érigent eux aussi en juge, sans en avoir les compétences, et surtout sans avoir jamais été investis légalement de tels pouvoirs. D'où le risque d'une pseudo justice privée.
L'arroseur arrosé ou un bel exemple de bad buzz
Dans un autre ordre d'idée, nous avons évoqué sur ce site et sur notre blog Votre Réputation la question des "bad buzz" (ou rumeurs négatives) voici peu (nos actualités du 26 janvier et du 5 février).
Voici le magnifique exemple d'une manœuvre qui non seulement s'est retournée contre les gérants de la supérette, mais aussi, par l'ampleur médiatique qu'elle a prise, rejaillit sur l'ensemble de l'enseigne (que nous avons pris soin de ne pas nommer ici).
Au service de votre réputation
Voir notre blog spécialisé sur l’e-réputation : www.votre-reputation.com
Et spécialement la rubrique Entreprises et dirigeants : www.votre-reputation.com/entreprises-et-dirigeants/