Les mises en garde de la CNIL sur l’extension du passe sanitaire

À la suite de l’audition de sa présidente par le Sénat, la CNIL a publié sa position sur l’extension du recours obligatoire au passe sanitaire prévue par le projet de loi relatif à la gestion de la crise liée à la COVID-19. Si elle ne remet pas en cause le principe de l’extension, la CNIL a souhaité attirer l’attention sur plusieurs points pour le débat parlementaire.

Le contexte et le rôle de la CNIL

La CNIL s’est déjà prononcée à deux reprises sur le passe sanitaire, par ses avis des 12 mai 2021 et 7 juin 2021. Le passe sanitaire était alors limité aux évènements de loisirs rassemblant plus de 1000 personnes et aux déplacements à l’étranger, ainsi qu’aux déplacements entre la métropole, la Corse ou l’outre-mer.

Depuis le 21 juillet 2021, le passe sanitaire est obligatoire pour les lieux de loisirs et de culture rassemblant plus de 50 personnes : les salles de spectacle, parcs d’attractions, salles de concert, festivals, salles de sport, cinémas...

Il a pour objectif de limiter la circulation de la COVID-19 en conditionnant l’accès à un certain nombre de lieux, évènements ou services, à la présentation d’un certificat de vaccination, d’un test de dépistage négatif à la COVID-19, ou d’un certificat de rétablissement à la suite d’une contamination antérieure à la COVID-19. Ce passe se présente sous la forme d’un QR code disponible depuis l’application TousAntiCovid ou en version papier.

Le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire, examiné en urgence par le Parlement, prévoit notamment une prolongation du dispositif jusqu’au 31 décembre 2021 et une très forte extension du passe sanitaire : sa présentation serait exigée pour l’accès aux bars, restaurants, transports public de longue distance et grands centres commerciaux.

D’autres mesures sont prévues dans le projet de loi, comme l’élargissement du régime du placement en isolement des personnes contaminées, la création d’une obligation vaccinale pour les personnes travaillant dans les secteurs sanitaire et médico?social, ou encore la modification du régime juridique des fichiers créés pour lutter contre l’épidémie.

Les délais de préparation du projet de loi n’ont pas permis au Gouvernement de saisir la CNIL, ce qui n’était pas légalement obligatoire. Cependant, le rapporteur du texte au Sénat a souhaité auditionner la présidente de la CNIL le 21 juillet 2021.

Par transparence, la CNIL a préféré rendre publique sa déclaration (pdf) lors de l'audition devant la Commission des lois du Sénat sur le projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire.

Voici ls points essentiels à retenir :

  • La CNIL alerte le Parlement sur le fait qu’instituer un passe sanitaire pour l’accès à des lieux de la vie courante et de nombreux moyens de transport est un choix éthique. Il faut éviter toute banalisation de ce type de mesure.
  • Le contexte sanitaire peut justifier des mesures exceptionnelles, si elles sont vraiment nécessaires pour lutter contre le rebond de l’épidémie et éviter un nouveau confinement.
  • La CNIL souligne que le fait que les tests soient gratuits ou payants est essentiel pour apprécier la portée de la mesure.
  • La CNIL invite le Parlement à s’interroger de façon précise sur les lieux où le passe sanitaire s’avère réellement nécessaire et sur la possibilité de ne pas inclure les mineurs dans le dispositif.
  • Elle estime indispensable que le Parlement demande une évaluation à l’automne de l’ensemble des dispositifs mis en œuvre pour lutter contre la COVID-19, et notamment des dispositifs numériques, afin de supprimer ceux dont l’utilité ne serait pas avérée.
  • La loi devrait préciser davantage les modalités de contrôle de l’identité des porteurs de passe sanitaire, pour éviter la généralisation de contrôles disproportionnés.

Plus d'infos : https://www.cnil.fr/fr/les-mises-en-garde-de-la-cnil-sur-lextension-du-passe-sanitaire

Fabrice MOLINARO